
Réaction face à l’altercation subie par le ministre de l’outremer
Bonjour à tous,
L’association APROFED revient vers vous cette semaine afin de réagir suite à la visite du ministre de l’outremer sur le territoire et à l’altercation que celui-ci a subi sur la voie publique de la part d’élus non indépendantistes.
Si l’association se navre d’un tel spectacle, elle félicite le ministre d’avoir utilisé le bon terme afin de qualifier la pensée loyaliste à savoir “révisionniste”. Pour rappel, le révisionnisme consiste à reconsidérer, voire remettre totalement en cause, un fait ou une théorie communément admis. Bien que non interdit par loi, à l’instar du négationnisme, l’agacement suscité des loyalistes au rappel du ministre de l’outremer au fait qu’il existe bel et bien un « peuple premier » en Nouvelle-Calédonie, amène certains journaux métropolitains à qualifier les élus loyalistes, encartés macronistes, comme radicalisés, ne cachant désormais plus leurs accointances avec l’extrême droite1.
La position du député indépendantiste au sein du groupe GDR, à l’extrême gauche à l’assemblée nationale, à l’instar de la majorité des députés ultramarins, ne vise pas à aider en vue d’une déradicalisation des pensées et pour une conciliation en vue de trouver un accord au conflit actuel.
L’association s’étonne également des propos “égalitaire” tenus par le député non indépendantiste qui veut qu’il ne peut y avoir de hiérarchie dans une société. Il ne devrait ainsi plus y avoir de différence entre salariés et patrons, entre enfants et parents, … Une telle vision ne s’apparenterait elle pas à du communisme?
L’association s’étonne également des slogans visant à défendre la démocratie, la notion d’un homme = une voix sur des pancartes tenues notamment par des femmes. Elles qui ont du attendre 100 ans de plus pour obtenir le droit de vote par rapports aux hommes en France.
Attention donc à l’instrumentalisation de ces grands principes et grandes idées, utiliser par certains comme des leurres en vue d’orienter un grand nombre vers des projets moins nobles, comme celui de « fédéralisme interne » porté par les loyalistes, qui n’est pas du fédéralisme, visant pour certains à “une départementalisation” du territoire, notamment pour la province Sud2.
L’association ne comprend pas un tel emportement de la part des élus loyalistes, dans la mesure où la France, au grand dam des indépendantistes, ne lâchera jamais la Nouvelle-Calédonie et son “or vert”, le Nickel, qui nous le rappelons fut l’un des objectifs de la colonisation, à savoir conquérir de nouveaux territoires afin de tirer de potentiels revenus de richesses exploitables (minière ou autres).
Par ailleurs, avec une armée française, deux fois supérieur à la population kanak, en terme d’effectif, la situation de la Nouvelle-Calédonie se veut ainsi totalement différente de celle de l’Algérie et des autres colonies ayant obtenu leurs indépendances non seulement par les armes mais aussi par supériorité numérique, au niveau humain.
Reste que l’Etat se retrouve aujourd’hui confronter au problème de savoir quoi mettre de plus dans la balance vis-à-vis des indépendantistes kanaks, qui ont d’ores et déjà l’un des statuts les plus avancés au sein de la république, que toutes les autres collectivités envient, non seulement ultramarines mais aussi métropolitaines. Bien que ce statut soit comme nous l’avons rappelé à plusieurs reprises un leurre. Les lois de pays étant le plus souvent corrigés par le conseil constitutionnel faisant de l’Etat le véritable et l’unique législateur. Ainsi après l’identité législative et la spécialité législative, l’association doute que l’Etat offre à la Nouvelle-Calédonie, l’étape suivante à savoir sa souveraineté législative concluant ainsi le projet fédéral mis en œuvre en 1988 par les accords de Matignon-Oudinot, par Michel Rocard.
Le “document martyr” proposé avant la crise de 2024 par G.Darmanin illustrant bel et bien la démarche de l’Etat désireux de revenir en arrière comme l’avait fait le Gal De Gaulle avec la loi cadre Deferre, revenant sur cette dernière avec les lois Billotte et Jacquinot, reprenant ainsi pour près de 30 ans l’autonomie de la Nouvelle-Calédonie au profit de Paris.
Ainsi, malgré les invectives des loyalistes vis-à-vis de l’Etat, il n’en demeure pas moins que celui-ci a besoin d’eux afin de ne pas avoir à négocier en direct avec les indépendantistes qui demanderait alors la médiation de l’ONU, ce qu’ils font déjà. L’Etat cherchant à se placer en tant qu’arbitre d’un conflit dans lequel il est l’un des 2 protagonistes seuls avec les indépendantistes, l’amenant ainsi dans le cadre d’échec des négociations et d’éventuels troubles, notamment armés, à légitimer l’intervention de la force, voire de l’armée, comme en 1988, mettant de facto le pays sous sa tutelle, renvoyant le désir d’autonomie renforcée au calendes grecques.
C’est pourquoi, face à ce jeu, les indépendantistes ont affirmé de ne pas vouloir reprendre les armes et de jouer la montre, pour ne pas dire le pourrissement de la situation, amenant l’Etat à devoir cracher un peu plus au bassinet, au moins pour conserver un minimum d’activités pour ses ressortissants sur place qui dans le cas contraire viendrait à réfléchir à quitter le territoire, ne justifiant plus de la présence de l’Etat en Mélanésie.
L’histoire étant un éternel recommencement, l’association espère en ce mois de février, que les évènements de février et avril 88 (prise en otages de gendarmes) ne se réitéreront pas car bien que cela abouti pendant quelques années à une prise du territoire par l’Etat, ce que souhaite les loyalistes, et aux accords de Matignon puis de Nouméa, donnant plus d’autonomie au territoire, ce que souhaite les indépendantistes, et a conserver le pays au sein de la république, ce que souhaite l’Etat, cela amena malheureusement la mort de plus de 20 personnes et autant de familles endeuillées. Espérons que le dicton voulant qu’il faut toujours attendre un mort pour que les choses avancent ne s’applique pas à nouveau.
L’association espère ainsi que les négociations devant se tenir durant 2 jours prochainement à Nouméa amèneront des propositions institutionnelles concrètes de la part de l’Etat à l’instar de celles faites pour le secteur économique. Car si l’Etat prêt à un partage plus poussé de sa souveraineté avec la Nouvelle-Calédonie, sous condition qu’elle demeure française, cela ne s’est traduit par aucune proposition concrète.
Pour conclure, l’association tient à féliciter le discours tenu chez Mr Santacroce s’excusant de l’attitude des 2 loyalistes envers le ministre, car cela ne correspond pas, en effet, en tant que calédoniens, toutes ethnies confondues, à notre façon de faire et notre savoir vivre, démontrant une fois de plus que ces 2 élus ne représentent pas l’ensemble des calédoniens.
2Kanaky Nouvelle-Calédonie : le peuple premier a permis à de nombreux immigrés d’intégrer la citoyenneté calédonienne
En vous souhaitant une bonne lecture et en vous rappelant que le fédéralisme est la seule solution pour concilier l’unité dans la diversité.
L’association APROFED